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Préface du général Charles-Henri de Monchy

 

La disparition du Général COFFRAND, dans l’intimité la plus absolue, à l’image de sa personnalité empreinte de réserve, de modestie et de discrétion, est l’occasion de faire connaître à l’ALAT et en particulier aux jeunes générations les services éminents que cet officier exemplaire a rendu à l’ALAT et à la France. Ceux qui n’ont pas eu l’honneur de le connaître, comprendront alors pourquoi cet homme exceptionnel avait de loin une connaissance totale et parfaite de l’histoire de notre arme, dans laquelle il débutera sa carrière en 1948 et qu’il ne quittera plus jusqu’à son départ en 1976.

 

Sous les ordres du Cdt Razy, il sera la cheville ouvrière de la création de l’état-major de l’ALOA en 1953, situé alors 2 avenue de Saxe dans le 7ème arrondissement de Paris, dans une baraque à la place de laquelle s’élève aujourd’hui l’UNESCO. Cet embryon du futur COMALAT se composait en outre d’un Adt et d’un jeune sous-officier, Mathoux, actuel porte-drapeau de l’UNAALAT, disposant d’un vélo réglementaire pour les liaisons avec l’EMAT ! Dix ans après, il rejoindra une nouvelle fois le COMALAT, maintenant installé sur l’héliport Issy-les-Moulineaux, où il tiendra le poste–clé de chef d’état-major.

 

Nommé Général de brigade, il terminera sa carrière avec plus de 3 000 heures de vol opérationnelles, dix citations dont six à l’ordre de l’armée, à Nancy, ville que l’ALAT a définitivement quittée en 2010 et où sont passés bon nombre d’appelés et d’engagés de notre arme.

 

Mais le Général COFFRAND s’est investi au service de l’ALAT bien au-delà de sa vie active en créant l’Entraide ALAT et en consacrant de nombreuses années à développer l’efficacité de cette organisation unique. Seul survivant de la période difficile de l’Indochine où s’est jouée l’existence même de l’ALAT, le Général Coffrand n’a jamais ménagé ses efforts pour honorer la mémoire de ses chefs, mais a toujours été d’une grande discrétion sur ses propres actions. Partout il a manifesté son sens de l’interet général et a défendu l’ALAT qui lui exprime aujourd’hui sa profonde reconnaissance.

 

Il n’est pas de meilleure manière d’honorer ce héros que de vous donner lecture du discours prononcé par le Général d’Armée Navereau lorsqu’il a élevé le Général Coffrand à la dignité de Grand Officier de la Légion d’Honneur.

Discours du général Hervé Navereau à l'occasion de  l'élévation à la dignité de Grand-officier de la Légion d'Honneur du général Coffrand

 

Mon cher Général,


C'est un moment très particulier qui m'est offert aujourd'hui, au moment de vous élever à la dignité de grand-officier de la légion d'honneur. En vous exprimant d'abord ma joie de voir vos mérites éminents enfin reconnus, en vous exprimant ensuite mes très sincères félicitations, je savoure enfin l'occasion de découvrir, puisque nous nous connaissons depuis longtemps, votre véritable personnalité souvent cachée par la réserve, la modestie et la discrétion.

Puisqu'il faut expliquer le pourquoi de cette dignité de grand officier je voudrais d'abord décrire la place étonnante que vous avez eue dans l'ALAT.

Après vous être engagé, en novembre 1939, en soulignant que la guerre avait été déclarée le 2 septembre, vous avez pratiqué successivement les chantiers de jeunesse, puis les Forces Françaises de l'Intérieur puis le 3ème dragon à Castres en 1944 avant de devenir enfin artilleur comme vous le serez jusqu'à la fin de votre carrière en rejoignant le 4ème régiment d'artillerie, régiment prestigieux s'il en est, puisque ce fut le régiment de Bonaparte !

Participant alors à la fin de la campagne de 1945, vous vous distinguez déjà par une action qui vous vaut votre première citation !

Puis c'est l'Ecole d'Artillerie à Idar Oberstein, de célèbre mémoire, puisque pour la plupart nous en sommes tous sortis !

Puis vient ce que j'appelle le parcours ALAT où vous êtes entré en septembre 1948 et dont vous êtes sorti le 3 janvier 1976 ! Donc, à l'évidence, vous connaissez bien l'ALAT n'est-il pas vrai ?

J'énumère successivement tous les postes que vous y avez tenus pour expliquer à tous ceux ici présents qui ne vous connaissaient que de loin, la parfaite, intime, complète possession intellectuelle que vous avez eue de l'ALAT.

Observateur avion en Indochine du 14 octobre 1949 au 1er septembre 1953. Quatre ans ! J'aurai l'occasion d'en reparler plus loin mais puisque nous parlons tous ici du même sujet que nous connaissons bien, quelle expérience opérationnelle et aéronautique vous avez acquises dans des conditions que nous sommes en mesure d'apprécier.

Vous êtes affecté en septembre 1953 au Commandement de l'ALAT. N'oublions pas que nous sommes au tout début de la création de l'ALAT. Vous êtes après l'expérience opérationnelle un des fondateurs de notre ALAT, avec les difficultés que nous savons et qui mériteraient un chapitre particulier.

Puis, c'est l'Algérie où vous êtes affecté en 1958 à l'Ecole d'Application de l'ALAT à Sidi bel Abbès. Notons dans cette construction de l'ALAT qu'elle a déjà un commandement et une école d'application. Impossible de ne pas évoquer au cours de cette marche en avant de l'ALAT, le travail du Général Lejay, du Général Razy et du Commandant Berthelot.... Mais vous les connaissez mieux que moi. Dans cette école d'application, vous participez aux opérations du secteur, puis êtes nommé successivement commandant en second, puis commandant de l'Ecole jusqu'en septembre 1963 en ayant effectué à cette date, le transfert de l'Ecole au Luc Le Cannet des Maures.

Après quatre ans en Indochine, cinq ans en Algérie, n'oublions pas le point de départ de 1939. 1939 -1963: vingt quatre années opérationnelles !


Vous prenez alors en septembre 1963 le commandement du GAOA 3 à Baden où, ce temps de commandement qui suit celui de Bel Abbès, vous permet de parfaire votre formation et justifie alors votre nomination au Comalat où vous tiendrez pendant trois ans le poste de chef d'Etat-Major. C'est là que nous avons travaillé quotidiennement ensemble et qu'est véritablement née notre amitié.

En juillet 1969 vous prenez le commandement du GALAT 103 à Versailles, puis nommé Colonel vous êtes désigné en juin 1971 pour prendre le commandement du CISALAT, Centre d'Instruction de l'ALAT où vous terminerez Général de Brigade, le 3 janvier 1976.

 
Quelle carrière, magnifique ! Elle contient toute l'histoire de l'ALAT.

 
Mais je dois maintenant parler précisément de vos mérites éminents qui vous valent votre élévation à la dignité. Le bilan est impressionnant, éloquent et justifie cette cérémonie d'aujourd'hui. Vous avez mérité dix citations dont six à l'ordre de l'Armée.

Votre première citation date du 24 mars 1946 dans les Vosges, à l'ordre du Régiment pour une action remarquée à la tête d'une section de Mortiers d'Infanterie, qui vous orientait déjà vers l'Artillerie.

Les six citations suivantes, toutes à l'ordre de l'Armée, comme observateur en avion. Je vous lis la quatrième citation acquise le 10 avril 1952

Citation à l'ordre de l'armée.

Décision n° 15 du ministre de la Défense Nationale, en date du 10 avril 1952
"Officier observateur de valeur exceptionnelle qui, depuis plus de deux années a pris une part glorieuse aux opérations de Cochinchine, du Sud Annam et du Cambodge. A donné un magnifique exemple de courage le 20 Juin 1951 sur la forêt d'AN NON THAY en déclenchant une intervention massive de l'artillerie sur 2 T.D. rebelles découverts au moment où ils faisaient mouvement vers une zone boisée. Pris sous le tir redoutable d'armes automatiques qui touchèrent six fois l'avion, malgré les défaillances graves du moteur perforé par trois balles de 12mm7, a tenu à rester sur l'opération à la limite des possibilités et continué à régler avec un sang-froid les tirs de l'artillerie.. Totalise 370 missions de guerre n° 2 en 1011 heures de vol dont 95 missions effectuées en 278 heures de vol depuis sa dernière citation." Cette citation comporte l'attribution de la Croix de Guerre des T.O.E. avec palme. Inutile de commenter, sinon d'admirer.

 

La dernière citation en Indochine, à l'ordre de l'armée elle aussi, à l'issue d'une opération d'envergure dans la Plaine des Joncs, se termine par la phrase suivante « mérite d'être cité en exemple à tout le personnel de l'Aviation Légère. Totalise depuis son arrivée en Extrême Orient 2073 heures de vol en 720 missions de guerre où l'avion est souvent touché."

Puis c'est en Algérie, comme pilote d'hélicoptère que vous méritez à nouveau trois citations à l'ordre de la Division, alors que vous exercez aussi, les charges de commandement et administratives de l'Ecole.

Toutes les citations du Capitaine, puis du Commandant Coffrand commencent par ces termes élogieux :

-officier observateur de classe, d'un courage et d'une abnégation au dessus de tout éloge

-officier observateur d'un grand mérite, montrant en toutes circonstances un sang-froid imperturbable-observateur d'une classe tout à fait exceptionnelle

-brillant officier d'une grande bravoure au dynamisme communicatif

Vous avez effectué en Algérie un millier d'heures de vol.

Total impressionnant que cette carrière opérationnelle avant tout, de commandement permanent, à tous les postes de 1'ALAT, marquée par le courage, la bravoure et la disponibilité.
 

Comment ne pas être admiratif !

 

Il me reste enfin à évoquer aujourd'hui, pour terminer ce panégyrique, votre personnalité qui est marquée d'abord par un équilibre et une modestie discrète, qui vous ont évité, tout en gardant en permanence le sens du devoir bien fait, de vous mettre en avant comme d'autres auraient pu ou su le faire à votre place.

 

Vous saviez parfaitement, bien que parfois n'en pensant pas moins, garder en opérations et après en Etat-major, garder dis-je votre sang froid devant des situations ou des prises de position de chefs qui n'étaient pas les vôtres. Mais votre raison, votre esprit de discipline, votre totale discipline intellectuelle vous ont permis d'accomplir vos missions, d'assumer vos responsabilités d'officier, comme il faut le faire.

 

Et ce faisant, vous avez conduit l'ALAT vers ses objectifs, malgré toutes les difficultés rencontrées. Vous pouvez à juste titre en être fier, et nous pouvons à juste titre vous en remercier.

 

Et vous remercier aussi pour votre engagement à la tête de l'Entraide ALAT, car après votre départ de l'activité votre connaissance de l'ALAT et vos qualités de cœur ont rendu tant de services à ceux qui, dans l'adversité, en avaient un tel besoin.

 

C'est donc pour l'ensemble de ces qualités éminentes que se justifie votre élévation à la qualité de grand officier, et je dois dire, qu'ayant pu apprécier en travaillant avec vous dans la plus entière confiance et amitié, combien j'ai plaisir à vous remettre cette dignité, au terme d'une si riche carrière.

 

Vous l'avez tant mérité !!!!!!

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